lundi 10 novembre 2008
Arthur Russell bis
Il y a plusieurs Arthur Russell. Le premier a produit des hits disco au début des années 80 dans un New York effervescent. Le Loft est alors à son apogée et David Mancuso
fait les modes. Un soir de 1979, il pointe le saphir sur un morceau signé Dinosaur, Kiss Me Again. Rien de révolutionnaire en apparence dans ces douze minutes mais pourtant la foule compacte se contorsionne sur cette mélodie sortie de l’enfer, nourrie de contrepoints de violoncelle et de motifs de guitares. On est loin de la disco industrielle qui annonce déjà la fin du genre. Le morceau ne figurait bizarrement pas sur la compilation que Soul Jazz a consacrée à Arthur Russell en 2004. Il marque pourtant l’entrée en territoire « pop » d’un musicien surdoué, violoncelliste de formation qui, au cours de sa brève existence (il meurt du sida en 1992, à 40 ans) a croisé le fer avec la fine fleur de l’avant-garde : Philip Glass, Allen Ginsberg, David Byrne, Rhys Chatham ou Bob Wilson, ils ont tous un jour trouvé sur leur chemin ce jeune homme débarquant de l’Iowa, timide mais déterminé, au visage grêlé par l’acné.
Pour lui, New York est la ville des possibles. Il se frotte à la musique « sérieuse » tout en découvrant l’énergie de la disco. Son histoire est retracée dans Wild Combination, un documentaire qui vaut surtout pour les images d’archives, bouleversantes : on y voit Russell littéralement envahi par sa musique, envisageant la disco comme une musique mentale. Au fil du temps, ses compositions ressemblent d’ailleurs à des mantras effilochés par la mélancolie. Une mélancolie omniprésente sur la compilation de raretés Love Is Overtaking Me. Il y a du Mark Hollis et du Nick Drake dans cette voix-là. Vingt morceaux à l’os dont James Murphy et Thom Yorke ne se sont jamais vraiment remis.
(texte rédigé pour Volume)
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